« IE » est un mot japonais désignant littéralement la maison mais,
plus généralement, le foyer ou la famille dans sa globalité.
Contrairement aux conceptions occidentales, la famille japonaise
n’a pas de limite temporelle ; il existe une unité familiale entre le passé
et le futur, englobant les membres actuels mais aussi les membres
décédés et même ceux qui ne sont pas encore nés.
Au sein d’une même famille, des événements incompréhensibles et parfois violents se répètent inlassablement. Mués par des émotions explosives, les corps semblent comme condamnés à extérioriser une souffrance qui refuse de dire son nom. À l’initiative d’une femme, qui ne s’exprime qu’avec ses mains, les secrets vont se mettre à transpirer et ce que l’on a pris soin de taire, peu à peu se dévoiler. Pour mener cette enquête passionnante sur l’atavisme générationnel, la chorégraphe Cécile Laloy met en place un détonnant tableau familial composé de quatre danseur.euse.s (dont un enfant), d’un musicien multi-instrumentiste et d’une comédienne interprète en langues des signes. Tous membres d’une même lignée, ils n’appartiennent pourtant pas à la même génération car comme dans les fêtes précolombiennes ou les rituels du théâtre Nô, les vivants côtoient ici les morts. Dans une cérémonie initiatique en plusieurs temps qui emprunte à la transe, les corps se libèrent et les ancêtres reprennent vie. Violente, viscérale et convulsive, la chorégraphie fait rejaillir alors « l’indicible », le « non-dit », ramenant au grand jour le passé enfoui.